UN PGR (Projet Grandeur Réèlle) EXCEPTIONNEL : EXPO LA LIBERTÉ MASQUÉE proposée par notre étudiante en Mastère PRO art contemporain Pascale Richetta.
L'exposition « Liberté masquée » présente les œuvres de quatre artistes de différentes nationalités, dont les créations sont autant de témoignages et de confrontations à leurs héritages historiques, culturels et personnels. La diversité de leurs propositions montre combien «la» liberté est plurielle. Le sujet est abordé ici de façon nécessairement arbitraire, au travers du regard de chaque artiste, de leur expérience et du contexte dans lequel chacun de leur parcours artistique s'est dessiné.
Leurs témoignages démontrent, s'il en était besoin, les intrications étroites entre passé et présent, tant au travers de leurs souvenirs que de leurs observations d'un présent aux couleurs parfois ancestrales. Qu'il s'agisse de migrations entreprises au péril de la vie et d'insoumis (Omer Amblas), de l'accès à l'eau potable au Nigéria (et dans d'autres territoires) et les dangers encourus par les femmes en charge de sa collecte (Joseph Obanubi), de la liberté d'expression, notamment celle des femmes, droit fondamental encore bafoué dans de nombreux territoires (Rezvan Zahedi), ou enfin de la question fondamentale et très actuelle de l'identité et du genre (Daniel Galicia), ces quatre artistes nous rappellent combien l'art joue un rôle fondamental dans notre conscience du monde.
L'exposition« Liberté masquée» sera l'opportunité d'un dialogue avec les artistes autour de la liberté mais aussi d'un questionnement très personnel des visiteurs, sans nul doute en résonance avec leur vécu des derniers mois. Une salle sera au demeurant dédiée aux « attestations de déplacement dérogatoire » devenues œuvres d'art, grâce aux créations de deux des artistes invités, qui ont transformé ces attestations en véritables passeports pour la liberté. Une exposition au souffle de liberté certain.
Une exposition sur « la » liberté ?
La liberté est un concept tellement riche qu'il est impossible de prétendre en épuiser toutes les significations à l'occasion d'une exposition. L'idée d'organiser une exposition consacrée à « la » liberté était donc, de facto, vouée à l'échec tant elle omettrait de dimensions fondamentales. Pourtant après ces derniers mois de confinements, d'interdits et de frustrations, le désir fut plus grand que la raison, conforté par l'enthousiasme des artistes contactés: le plaisir du partage serait plus grand que le risque. Notre « liberté masquée » pouvait enfin trouver un espace où les créations de quatre artistes, venus de quatre continents, en illustreraient certaines facettes et susciteraient curiosité, passion, discussions à un moment où le tumulte du monde est grand et où l'art, aiguillon de notre conscience du monde, est plus que jamais nécessaire, peut-être vital.
1•Le terme « liberté » désigne, de façon générale, la possibilité d'action ou de mouvement, mais aussi la possibilité pour un individu d'exercer sa volonté, c'est-à-dire sa capacité pleine et entière de choisir et de faire, sans contrainte. Le mot vient du latin libertas qui recouvre plusieurs sens: non-esclave, ayant les droits de citoyen, peuple qui n'est pas inféodé à une autorité, indépendance et franchise.
2•L'abolition de l'esclavage, en 1794 puis en 1848, et la Déclaration Universelle des droits de l'homme 3•, en 1948, restent deux textes fondamentaux, ce dernier précisant bien que la liberté est le droit de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui (article 4), pointant le doigt sur les potentielles tensions entre liberté individuelle et liberté collective.
4•Art et liberté
L'art a la capacité de faire prendre conscience, autrement dit il peut agir comme un miroir offrant une image possible du monde réel. Il peut modifier notre regard sur le monde. Son accessibilité est fondamentale, la rencontre avec les œuvres d'art doit être possible pour tous les publics, sans exception. Si l'art doit pouvoir garder sa liberté, la voix de l'artiste est plus cruciale que jamais dans un monde de chocs et de conflits.
1 Définitions lexicographiques et étymologiques de« liberté» du Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales: https:// www.cnrtl.fr/definition/liberté
2 https:/ /www2.assemblee-nationale.fr/14/evenements/2016/abolition-de-1-esclavage-1794- et-1848
3 http://www. textes.justice.gouv. fr /textes-fondamentaux-10086/-droits-de-1homme-et-libertes-fondamentales-10087 /declaration-universelle-des-droits-de-lhomme-de-1948-11038.html
4 Catalogue de l'exposition« Globale Résistance», sous la direction de Christine Macel, Alicia Knock et Yung Ma, Editions du Centre Pompidou, Paris, 2020 Liberté plurielle
L'exposition « Liberté masquée » réunit des artistes venus de quatre continents, Europe/Caraïbes, Amérique latine, Afrique et Moyen-Orient, une femme et trois hommes, de générations différentes.
Leurs héritages historiques, culturels et personnels sont donc très différents:
- La liberté pour Omer est à la fois histoire et actualité. Histoire car ses ancêtres ont vécu l'abolition de l'esclavage; actualité quand Omer montre les insoumis et la misère, le désespoir, voire la mort des migrants qui s'embarquent pour une traversée pleine d'espoir mais au combien précaire et souvent déçue.
- La liberté pour Daniel est celle d'une intimité partagée, qui au travers de son histoire personnelle, de l'alchimie de ses cultures, mexicaine, québécoise et maintenant française, et de l'hommage qu'il rend aux femmes fortes de sa vie, permet de poser la question fondamentale de l'identité et du genre, parfois même jusqu'à la liberté de renaître.
- La liberté pour Joseph est celle de l'accès à l'eau potable, avec les risques pris par les femmes en charge de sa collecte, longs trajets, parfois à la nuit tombante, qui les exposent aux agressions sexuelles ou aux attaques d'animaux sauvages; cette eau est au demeurant essentielle dans la religion Yoruba, qui la considère comme un symbole de force et de pouvoir.
La liberté pour Rezvan est bien sûr la liberté d'expression, en particulier celle des femmes. Elle dénonce les restrictions et les dépréciations dont les femmes sont victimes dans son pays. Elle convoque les textes de la poétesse Forough Farrokhzad5, qui exprime la volonté de s'émanciper par la réhabilitation de son corps et par l'accession à son auto-nomie dans une société contrainte.
Leurs expressions de la liberté nous offrent de puissants miroirs dans lesquels se plonger afin de mieux appréhender notre propre liberté, forcément plurielle.
Omer Amblas est né en 1948 à Capesterre-Belle-Eau en Guadeloupe. Il vit et travaille à côté de La Rochelle. S'il commence à peindre dès l'âge de 9 ans, ce n'est qu'à 30 ans qu'il étudie l'histoire de l'art et l'architecture à Nantes. Il expose dans de nombreux salons et galeries (Salon des Indépendants au Grand Palais notamment). Omer peint avant tout l'expression, les émotions, pas le détail.
Son thème de prédilection est le visage humain, qu'il peint tel un paysage. La présence de coups de brosse, talés sur la surface, créée une sorte d'effacement physique et symbo-lique, sorte de perte de mémoire et d'identité de ces insoumis. Sa pein-ture, entre art abstrait et expression-nisme, met en scène des personnages qui n'ont pas pu s'exprimer, référence à Aimé Césaire6 qui écrivait: « Ma bouche sera celle des malheurs qui n'ont point de bouche. Ma voix, la liberté de celles qui s'affaissent au cachot du désespoir. »
Daniel Galicia
Daniel Galicia est né en 1993 à Mexico, au Mexique. Il vit et travaille à Paris. Adolescent, il quitte le Mexique avec sa mère et s'installe à Montréal. Il étudie à la Faculté des Beaux-Arts de Concordia-Montréal puis entre aux Beaux-Arts de Lyon où il obtient son Diplôme National d'Art avec les félicitations du jury. Il est actuellement aux Beaux-Arts de Paris, en 4ème année (Atelier Reilly). Artiste plasti-cien, il utilise souvent l'autoportrait comme outil de travail. À partir de documents officiels, de photos de famille et d'identité, il construit « sa » mythologie en nous racontant son expérience migratoire, ses relations amoureuses et sa gender fluidity7. La peinture, le dessin, la photographie, la broderie et la performance sont les différentes formes de sa narration.
6• Aimé Césaire, Cahier d'un retour au pays natal, 1939 - réédition en 2015, éditions de L'Harmattan
7• Fluidité de genre : terme qui englobe tous ceux qui, dans leur identité de genre, ne se sentent ni tout à fait homme ni tout à fait femme, ou à la fois homme et femme, ou encore homme né dans un corps de femme ou inversement, c'est-à-dire toute perception de l'identité qui ne correspond pas strictement à notre catégorisation binaire entre masculin et féminin (syn. : non-binaire)
Joseph Obanubi
Joseph Obanubi est né en 1994 à Lagos, au Nigéria. Il vit et travaille à Lagos. Il est représenté par la galerie MAGNIN-A. Joseph a étudié le design graphique à l'université de Lagos, dont il sort diplômé en 2017. Major de promotion en Art Visuel, il se lance dans ses premiers projets artistiques et publicitaires. Sa série Techno Heads le place finaliste du Contemporary African Photogra-phy Prize (2019).
Il remporte en 2019 le prix du British Council pour les artistes visuels émergents. Son travail a été exposé à la foire d'art AKAA (2019) et aux éditions de la foire d'art 1-54 à Londres et à Marrakech (2019 & 2020), entre autres. Son travail explore les questions identitaires qu'il traduit dans une esthétique afro-futuriste. Il collecte des fragments "visuels" du quotidien, qu'il assemble en collages digitaux: son but est de créer une nouvelle perception qui nous rassemble. Il est actuellement en résidence à la Cité Internationale des Arts à Paris8
Rezvan Zahedi est née en 1987 à Booshehr, en Iran. Elle vit et travaille à Paris. Rezvan Zahedi est une artiste visuelle. Elle se consacre tout d'abord à la photographie de graffitis dans les rues des mégapoles iraniennes. En 2013, elle organise dans son pays une exposition clandestine de son travail, en raison de l'engagement politique de ses images, et est emprisonnée. Elle participe en 2015, à Paris, à l'exposition« Hip-Hop: du Bronx aux rues arabes » à l'Institut du monde arabe, où elle présente ses photographies et plaide pour la condition des femmes, dénonçant l'impact de certaines règles, normes ou lois sur leurs libertés, ne pouvant retourner en Iran, elle décide de rester en France et rejoint l'Atelier des Artistes en Exil.
Elle étudie la photographie à l'EFET (Paris, 11 ème). Son travail est mis à l'honneur dans différentes expositions : (Un)capture Beauty, à la Villa Rose, Paris (2019), au Festival Visions d'Exil, au musée national de l'histoire de l'immigration (2019) ou encore au Pavil-lon Carré de Baudoin, Paris (2020).
Rezvan place la question des libertés au cœur de son travail artistique et notamment celles des femmes.
8 https://www.citedesartsparis.net
EXPOSITION EXPACE CHRISTIANE PEUGEOT
62, avenue de la Grande Armée, Paris 17ème
Tous les jours, du mercredi 15/09/21 au dimanche 26/09/21
3 -19 heures, nocturne jusqu'à 21 heures vendredis & samedis